La production sans recours au génie génétique fait partie de l’agriculture paysanne et représente un avantage qualitatif pour les paysannes et paysans suisses. C’est pourquoi l’Association des petits paysans s’engage en faveur d’alternatives à faible risque sans génie génétique et soutient la recherche prometteuse et la promotion de la sélection végétale.
Une production alimentaire durable renonce aux plantes génétiquement modifiées et mise sur une production agroécologique. À la place de plantes de laboratoires, des plantes de cultures adaptées au site, combinées avec des méthodes de culture plus douces, permettent de mieux atteindre l’objectif et de manière plus durable. Les plantes modifiées génétiquement servent l’agriculture industrielle se basant fortement sur l’utilisation de pesticides et d’engrais, avec des conséquences importantes pour l’environnement: la diversité en espèces diminue, des mauvaises herbes et ravageurs résistants menacent la récolte, et la fertilité des sols en pâtit. Tant qu’aucune plus-value significative ne sera démontrée, sans que cela n’entraîne des effets négatifs sur l’environnement ou les consommateur·trices, la Suisse doit absolument maintenir une production sans OGM comme marque de qualité de son agriculture. En Suisse, la culture de plantes génétiquement modifiées est heureusement interdite jusqu’à fin 2030 grâce au moratoire. La recherche est et doit rester autorisée. Pour l’agriculture suisse qui table sur la qualité pour marquer des points, l’abandon des plantes génétiquement modifiées est une conséquence logique. De plus, la séparation des flux de marchandises est trop coûteuse et logistiquement impossible. Les agriculteurs qui renonceraient au génie génétique seraient désavantagés. Si la culture des végétaux issus des nouveaux procédés de génie génétique devait être autorisée à l’avenir, la production sans OGM et la liberté de choix devraient être garanties.
Le moratoire - une histoire à succès
Avec l’adoption de l’initiative sans OGM, la mise sur le marché d’organismes génétiquement modifiés en agriculture a fait l’objet d’un moratoire de cinq ans en Suisse. Depuis lors, ce moratoire a été prolongé à cinq reprises et est actuellement applicable jusqu’à fin 2030. Depuis sa création, l’Association des petits paysans s’engage en faveur d’une Suisse sans OGM et a joué un rôle prépondérant dans l’introduction du moratoire.
L’Alliance suisse pour une agriculture sans génie génétique (Stop OGM) a lancé l’initiative en 2003. Elle exigeait un moratoire de cinq ans sur la culture de plantes génétiquement modifiées (OGM) et une interdiction des manipulations génétiques des animaux d’élevage. En novembre 2005, le peuple suisse a approuvé ce projet avec une majorité de 55,7 pour cent. En 2010, le moratoire a été prolongé jusqu’en 2013. Avec la PA 14-17, le moratoire sur les cultures a été prolongé une deuxième fois. Le facteur décisif a été l’insuffisance des exigences juridiques de l’actuelle Loi sur le génie génétique. La confédération souhaitait adopter une ordonnance sur la coexistence qui devait permettre la cohabitation entre les OGM et les plantes non génétiquement modifiées. Le gouvernement a envoyé ladite ordonnance en consultation début 2013. La majorité des participants à la consultation s’est opposée à la culture d’OGM en Suisse. Dans le même temps, les cantons de Genève, Berne, Neuchâtel, Fribourg et du Jura ont déposé une initiative cantonale commune visant à prolonger le moratoire. Peu de temps après, le canton de Thurgovie a lui aussi soutenu cette revendication. Au niveau cantonal, Fribourg, Genève et le Tessin vont encore plus loin et ont introduit l’interdiction de cultiver des OGM dans leur législation agricole.
Le Conseil fédéral a réagi en 2015 et prolongé le moratoire jusqu’en 2021. D’ici là, les règles de coexistence et les conditions-cadres devaient être formulées pour laisser le moratoire expirer ou l’assouplir. Cette proposition a toutefois été rejetée par le Parlement. L’association des petits paysans a salué la prolongation du moratoire et le rejet de la proposition de coexistence. Elle a toutefois demandé une interdiction à plus long terme, car la coexistence entre les cultures avec et sans OGM est impossible à mettre en œuvre pour l’agriculture suisse à petite échelle. En 2021, le Parlement a décidé de prolonger le moratoire jusqu’à fin 2025 et a chargé le Conseil fédéral de soumettre un projet de loi pour une réglementation d’autorisation basée sur les risques pour des plantes issues de nouvelles techniques de génie génétique. Les délibérations sur ce projet de loi n’ayant pas abouti avant la fin du moratoire en cours, celui-ci a été prolongé jusqu’à fin 2030.
Nouvelles techniques de modification génétique
Les nouvelles techniques de génie génétique promettent une «modification» précise des plantes, animaux et hommes. Mais à quel point ces techniques sont-elles précises? Qu’en est-il des effets involontaires? Dans quelle mesure les modifications souhaitées dans les plantes sont-elles judicieuses? Et qui profitera de leur application? Une réflexion critique et une réglementation prudente s’impose de toute urgence.
Il existe différentes méthodes parmi les nouvelles techniques de génie génétique. La modification du génome par CRISPR/Cas utilise ce qu’on appelle des ciseaux moléculaires pour modifier le génome, ou des interventions directes sont faites dans la régulation des gènes. L’agro-industrie et celle des biotechnologies, ainsi que de nombreux chercheurs, demandent que ces nouvelles techniques de modification génétique soient exemptées de la réglementation existante sur le génie génétique, malgré le peu de connaissances et le manque d’expérience sur ces techniques, et contre l’avis de divers experts indépendants qui ont montré que ces nouvelles techniques aussi doivent tomber sous le coup de la Loi sur le génie génétique. Une pétition contenant cette revendication, accompagnée de plus de 30 000 signatures, a été déposée auprès de la Chancellerie fédérale le 31 août 2018. En 2024, l’initiative populaire «Pour des aliments sans organismes génétiquement modifiés» (Initiative pour la protection des aliments) a été lancée afin d’exiger une obligation d’étiquetage, des mesures visant à protéger l’agriculture sans OGM, l’interdiction des brevets et des semences issues de la sélection traditionnelle, le respect du principe de précaution et des évaluations des risques pour les organismes génétiquement modifiés.
Les procédés doivent dans l’ensemble être plus efficaces. Mais cela ne signifie pas pour autant qu’ils soient plus sûrs ou contrôlables. Le potentiel de modification du matériel génétique des nouvelles techniques va bien au-delà de celui des anciennes méthodes de génie génétique. Les limites de faisabilité et d’influence du matériel génétique sont clairement repoussées. Les nouveaux outils entraînent une vague d’application du génie génétique dans le domaine de la sélection végétale et animale. Si les nouvelles techniques de modification génétique ne sont pas soumises à la Loi sur le génie génétique, des plantes ou des animaux produits de cette manière pourraient être vendus sans évaluation des risques ni déclaration. Dans ce cas, les consommateurs et consommatrices ne sauraient même pas s’ils ont des aliments génétiquement modifiés ou non dans leur assiette.
Sans OGM du champ à l’assiette
En raison du moratoire sur le génie génétique qui reste en vigueur jusqu’à fin 2030, aucune plante génétiquement modifiée n’est cultivée en Suisse. Grâce à un renoncement volontaire, les aliments pour animaux génétiquement modifiés ne sont pas non plus utilisés. L’agriculture suisse produit donc aujourd’hui sans OGM, non seulement directement dans la culture, mais aussi indirectement dans l’affouragement.
Contrairement à la culture, l’importation de plantes génétiquement modifiées (ne pouvant plus se reproduire, par exemple broyées) pour l’alimentation animale est possible si une autorisation est accordée. Jusqu’à présent, l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) a autorisé une variété de soja génétiquement modifié et quatre variétés de maïs génétiquement modifié. L’autorisation de l’une des variétés de maïs génétiquement modifié n’a pas été renouvelée après quinze ans. Bien que ce ne soit interdit, l’ensemble des animaux d’élevage de notre pays sont nourris sans OGM. La Suisse est donc exempte d’OGM dans les cultures et jusqu’à l’alimentation animale. C’est ce qu’exigent de toute façon de nombreux labels (Bio Suisse, IP-Suisse, Suisse Garantie, non exhaustif). La politique agricole stipule que la Confédération soutient l’orientation de l’agriculture et de la filière alimentaire vers une stratégie qualité commune. Cette Stratégie Qualité affirme notamment: «L’agriculture renonce volontairement, afin de saisir des opportunités du marché, à utiliser des organismes génétiquement modifiés (végétaux reproductibles, parties de végétaux, semences et animaux). » De nombreuses entreprises et organisations du secteur agroalimentaire de Suisse ont signé cette stratégie. Donc aujourd’hui, les consommatrices et consommateurs peuvent compter sur les agriculteurs suisses pour nourrir leurs animaux sans aliments génétiquement modifiés. Une raison de plus pour choisir de la viande, des œufs et des produits laitiers suisses à la maison ou à l’extérieur. En n’utilisant aucun aliment génétiquement modifié, les agriculteurs suisses produisent ce que le marché demande et envoient un signal clair contre une agriculture seulement industrielle.
Culture de plantes bio sous pression
Nous n’importons de l’étranger pas que la moitié des légumes consommés en Suisse. Nous importons aussi les semences pour les légumes produits en Suisse. Il y a 30 ans, il s’agissait avant tout des semences. Aujourd’hui, à cause de l’intensification de la culture maraîchère, nous importons surtout les plants. En agriculture biologique aussi, la plupart des variétés utilisées proviennent de la sélection conventionnelle. Il faut agir, mais ce n’est pas si facile car la culture biologique reste sous pression.
La
pression sur la sélection des plantes alternative est grande. Cette pression s’est encore accrue avec l’arrivée de nouvelles techniques de modification génétique. Les nouvelles techniques de modification génétique devraient encore une fois tout régler: créer des plantes résistantes aux sécheresses et aux parasites et protéger la population mondiale de la faim. De plus, les nouvelles méthodes permettraient d’obtenir beaucoup plus rapidement les propriétés souhaitées des plantes. En tout cas selon un employé de Syngenta lors d’une conférence sur les nouvelles techniques de modification génétique en sélection végétale. La culture de plantes en agriculture biologique prendrait trop de temps et se baserait sur des ressources génétiques bien trop restreintes, selon les partisans du génie génétique, en dépit des risques et des incertitudes liées aux plantes modifiées génétiquement.
Pour l’Association des petits paysans, cette démarche fait fausse route. L’agriculture a besoin de plantes adaptées au site, cultivées en interaction avec l’environnement plutôt que dans un laboratoire stérile, en combinaison avec des méthodes de culture douces. C’est la base d’une agriculture paysanne diversifiée et orientée vers l’avenir.
- « Brevets: Un danger pour la sélection sans OGM » Fiche technique 2015
- Brochure « Sans OGM pourquoi? » (2018)
- « Von Anfang an Bio » Ökologo 4/2017
- « Die cisgene-Kartoffel und ihre Bioalternative » Ökologo 4/2015
- Semences bio – comment renforcer leur disponibilité (www.infogm.org)
- Label Bioverita: Semences issues de sélection biologique (en allemand ou anglais)
- Zollinger – semence bio suisse
- Biosem – semence bio suisse
- Sativa – semence bio suisse